Appel unitaire isérois pour la jeunesse populaire 3 juillet
Le meurtre de Nahel par la police à Nanterre a mis en lumière les tensions toujours très fortes dans les quartiers populaires de France qui dépassent le seul cadre des violences policières : discriminations racistes et injustices sont quotidiennes pour ces habitant-es. Cette mort allonge la liste des personnes tuées lors de contrôles policiers. Elle met en lumière les effets de décennies de politiques publiques défaillantes en direction des quartiers populaires et de la jeunesse qui y grandit. Elle nécessite une réponse politique de court et de long terme.
Vendredi 30 juin, la préfecture a interdit le rassemblement place Verdun pour demander justice et vérité pour Nahel. Si l’objectif était le « maintien de l’ordre », l’échec est net. C’est une illustration de plus de l’omniprésence des réponses répressives et autoritaires que le gouvernement oppose aux mouvements de luttes et de révoltes pour une société plus solidaire. L’État empêche l’expression de paroles collectives à laquelle comptaient participer nombre de nos organisations syndicales, associatives, politiques ou de quartiers. Ces paroles sont pourtant essentielles pour essayer de répondre aux questions fondamentales que les révoltes de ces derniers jour imposent.
Nous, signataires de cette tribune, sommes convaincu-es que l’avenir de la société se joue dans la place qu’elle parvient à faire à toutes les jeunesses. Nous exigeons un plan ambitieux qui permette de sortir par le haut d’une situation que les gouvernements, actuels et passés, ont contribué à créer et ont laissé dégénérer.
Une grande partie de la population subit le racisme au quotidien, victime de préjugés, de discriminations, et de violences. Un climat idéologique d’ensemble stigmatise en particulier les musulman·es ou celles et ceux qui sont perçu·es comme tel·les et notamment les jeunes. C’est cette situation-là qui ne peut plus durer et contre laquelle nous devons lutter ensemble. Dans les quartiers populaires, les rapports entre la police et la population, sont conflictuels et discriminants. L’impunité offerte à cette police lui autorise depuis longtemps violences arbitraires et racistes. Il est prouvé, par exemple, que les jeunes hommes perçus comme arabes ou noirs ont 20 fois plus de probabilité d’être contrôlés par la police que les autres. L’abrogation de la loi de 2017 sur l’assouplissement des règles en matière d’usage des armes à feu par la police est donc urgente, ainsi que la création d’un organisme indépendant de contrôle, en remplacement de l’IGPN. L’urgence n’est pas celle de la répression ou de l’état d’urgence qui renforcera l’extrême-droite et fera reculer les libertés : c’est celle de la justice pour Nahel et la fin des violences policières.
L’ONU a critiqué à plusieurs reprises les politiques sécuritaires et les problèmes de racisme en France, en particulier dans les forces de l’ordre. Ce sont ces discriminations qui sont un toxique qui décrédibilise l’idée même d’égalité ! L’extrême droite en fait son lit pour diviser toujours davantage.
La relégation sociale de la jeunesse populaire est à la fois le résultat de politiques de marginalisation des quartiers populaires et d’un affaiblissement général des services publics. L’École a subi des années de suppressions d’emplois. L’Éducation prioritaire a été démantelée dans les lycées, diluée en collège. Les quartiers populaires ont besoin de services publics qui permettent de créer du lien social, de la solidarité, de la proximité, de l’égalité. Ceux-ci disparaissent alimentant un sentiment légitime d’abandon : comment croire à l’égalité dans ces conditions ? Quand les quartiers restent enclavés, faute de transports accessibles, sans médecins, sans hôpital de proximité ? Quand le logement est profondément dégradé dans ces quartiers, accentuant le sentiment de relégation ? Quand l’accès à l’emploi est plus difficile pour les jeunes de ces quartiers, comme l’ont démontré de multiples études ?
L’espoir d’un avenir meilleur pour la jeunesse populaire passe par un grand plan d’investissement pour l’École, les transports, le logement et l’emploi. Il passe aussi par le soutien aux associations de proximité qui ont subi toutes ces dernières années les coupures de subvention, et un contrôle de plus en plus renforcé sous prétexte du respect des principes républicains. Il passe enfin par la lutte prioritaire contre la misère au lieu de la guerre menée par l’État contre les plus précaires d’entre nous : loi Kasbarian contre les sans-toit, loi Darmanin contre les migrant·es…