Le capitalisme financiarisé a réduit la capacité des États à répondre à des crises comme celle du Covid 19. La crise du coronavirus qui touche toute la planète révèle les profondes carences des politiques nationale et internationale qui sont au service d’une minorité de privilégiés.
Emmanuel Macron, dans ses dernières allocutions, appelle à des « décisions de rupture » et à placer « des services (…) en dehors des lois du marché ».
Nos organisations, conscientes de l’urgence sociale et écologique, et donnant l’alerte depuis des années, n’attendent pas des discours mais des changements profonds afin de répondre aux besoins immédiats et donner l’opportunité historique d’une remise à plat du système, en France et dans le monde.
Nous portons ici les revendications minimales et immédiates :
1- L’arrêt immédiat des activités non indispensables pour faire face à l’épidémie.
2- Les réquisitions des établissements médicaux privés et des entreprises afin de produire dans l’urgence masques, respirateurs et tout le matériel nécessaire pour sauver des vies.
3- La suspension immédiate du versement par les entreprises de dividendes, rachats d’actions et bonus aux PDG.
4- La décision de ne pas utiliser les 750 milliards d’euros de la BCE pour alimenter les marchés financiers mais uniquement pour financer les besoins sociaux et écologiques des populations.
5- Un plan de développement de tous les services publics
6- Une fiscalité bien plus juste et redistributive, un impôt sur les grandes fortunes, une taxe sur les transactions financières et une véritable lutte contre l’évasion fiscale.
7- Un plan de réorientation et de relocalisation solidaire de l’agriculture, de l’industrie et des services, pour les rendre plus justes socialement, en mesure de satisfaire les besoins essentiels des populations, de répondre à la crise écologique.
Dès à présent, toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé des populations celle des personnels de santé, parmi lesquels une grande majorité de femmes, doivent être mises en œuvre. Ceci doit largement prévaloir sur les considérations économiques.
Le Capitalisme depuis le tournant des années 80, en France et dans le monde, a approfondi les inégalités sociales et la crise du coronavirus s’abattra notamment sur les plus précaires. Selon que l’on soit plus ou moins pauvre, déjà malade ou non, plus ou moins âgé·e, une femme ou non, les conditions de confinement, les risques de contagion, la possibilité d’être bien soigné.e ne sont pas les mêmes. Des mesures supplémentaires au nom de la justice sociale sont donc nécessaires :
1- Réquisition des logements vacants pour les sans-abris et les très mal logés, y compris les demandeurs·euses d’asile en attente de réponse,
2- Rétablissement intégral des aides au logement, moratoire sur loyers et les factures impayées d’énergie, d’eau, de téléphone et d’internet pour les plus démuni·es.
3- Des moyens d’urgence doivent être débloqués pour protéger les femmes et enfants victimes de violences familiales.
Les moyens dégagés par le gouvernement pour aider les entreprises doivent être dirigés en priorité vers les entreprises réellement en difficulté et notamment les indépendants, autoentrepreneurs, TPE et PME, dont les trésoreries sont les plus faibles. Et pour éviter que les salarié·es soient la variable d’ajustement, le versement des dividendes et le rachat d’actions dans les entreprises, qui ont atteint des niveaux record récemment, doivent être immédiatement suspendus et encadrés à moyen terme.
Cette crise ne peut une nouvelle fois être payée par les plus vulnérables comme en 2008. Une réelle remise à plat des règles fiscales nationale et internationale afin de lutter efficacement contre l’évasion fiscale est nécessaire et les plus aisés devront être mis davantage à contribution, via une fiscalité du patrimoine et des revenus, ambitieuse et progressive.
Car l’enjeu n’est pas la relance d’une économie profondément insoutenable. Il s’agit de soutenir les investissements et la création massive d’emplois dans la transition écologique et énergétique, de désinvestir des activités les plus polluantes et climaticides, d’opérer un vaste partage des richesses et de mener des politiques bien plus ambitieuses de formation et de reconversion professionnelles pour éviter que les travailleurs·euses et les populations précaires n’en fassent les frais.
De même, des soutiens financiers massifs devront être réorientés vers les services publics, dont la crise du coronavirus révèle de façon cruelle leur état désastreux : santé publique, éducation et recherche publique, services aux personnes dépendantes. Les secteurs essentiels à la vie de la population ne doivent pas être laissé entre les mains des capitalistes. Des secteurs comme l’eau, le gaz, l’électricité doivent devenir un grand monopole public, sous contrôle de ses agents et de la population…
La Sécurité sociale financée par les cotisations
sociales,
selon
le principe « cotiser selon ses moyens et à recevoir
selon ses besoins » doit reprendre toute sa place dans notre société et rompre avec la logique marchande mise en œuvre dans l’assurance maladie. Notre système de santé doit être amélioré
pour mieux répondre
aux besoins de
la population, en particuliers pour que nos ancien·nes soient bien traité.es et soigné.es.
La « crise du coronavirus » révèle notre vulnérabilité face à des chaînes de production mondialisée et un commerce international en flux tendu, qui nous empêchent de disposer en cas de choc de biens de première nécessité : masques, médicaments indispensables, etc. Des crises comme celle-ci se reproduiront. La relocalisation des activités, dans l’industrie, dans l’agriculture et les services, doit permettre d’instaurer une meilleure autonomie face aux marchés internationaux, de reprendre le contrôle sur les modes de production et d’enclencher une transition écologique et sociale des activités. Il faut en finir avec la politique du zéro stock et de l’exploitation des ressources naturelles et des sociétés.
La relocalisation n’est pas synonyme de repli sur soi et d’un nationalisme égoïste. Nous avons besoin d’une régulation internationale refondée sur la coopération et la réponse à la crise écologique, dans le cadre d’instances multilatérales et démocratiques, en rupture avec la mondialisation néolibérale et les tentatives hégémoniques des États les plus puissants.
Les réponses libérales et autoritaires prônées par les gouvernants ne sont pas les nôtres et font peser des risques quant à notre avenir commun. Dans cette période, on nous présente les outils numériques et la dématérialisation des services comme une bouée de sauvetage de l’économie et de nos vies confinées. Loin d’être la solution, le capitalisme numérique (qui risque de s’imposer de manière durable) fait partie du problème : Il détruit des emplois et la proximité (alors que l’hôpital public nécessite des moyens humains, le gouvernement développe les « téléconsultations ») en même temps qu’il ravage l’environnement et les rapports humains. De nouvelles applications de surveillance réduisent chaque jour un peu plus nos libertés publiques. Il faut stopper cette croissance mortifère du tout numérique.
La sortie du confinement doit être réfléchie au plus vite entre les autorités sanitaires mais aussi avec les représentants des travailleur·euses et les citoyen·nes.
Plus jamais ça ! Lorsque la fin de la pandémie le permettra, nous nous donnons rendez-vous pour réinvestir les lieux publics et construire notre « jour d’après ». Ne comptons pas sur celles et ceux qui nous ont précipité.es dans la crise pour nous en sortir.
Nous en appelons à la mobilisation de toutes les forces progressistes et humanistes, et plus largement à toute la société, pour reconstruire ensemble un futur démocratique, écologique et social.
Grenoble, le 30 avril 2020
Cet appel isérois est un complément à l’appel national Plus Jamais ça ! Préparons le jour d’Après ! initié par 18 organisations. nous vous invitons à le lire, et à signer massivement la pétition qui a désormais dépassée les 150.000 signataires ! Nous vous invitons également à prendre connaissance de l’appel Bas les masques, un appel de soignant.e.s à construire un mouvement populaire.